Édition #1 — 17 mars 2019
Quel meilleur jour y a-t-il pour lancer la newsletter Whisky Weekly que ce jour de Saint Patrick ?
On a beau être fan de l’Ecosse, on est obligé de le reconnaître : il y a de fortes probabilités que le whisky soit né en Irlande, il y a quelques siècles.
Pourtant, ce n’est pas d’Irlande que nous allons parler dans cette première édition (on se garde ça pour dimanche prochain , mais du seul autre pays où un E a été ajouté au mot whisky : les Etats-Unis
Pourquoi ? Parce qu’on a assisté, lundi, à une dégustation de whiskeys américains. C’était donc de l’actualité toute chaude, et on vous raconte ça un peu plus bas…
Bonne lecture,
Robin & Julien
Nos coups de coeur, nos soirées dégustations, nos critiques, etc… – Par Robin
Cette dégustation a donc eu lieu lundi dernier, le 11 mars, au Hopscotch, notre QG à Toulouse. C’est en petit comité qu’on est parti faire un tour aux Etats-Unis, guidés par un ambassadeur de la Maison du Whisky spécialisé dans les whiskeys américains, Jonathan Lax.
Disons-le d’emblée : on n’est pas des grands fans de whiskeys américains. En même temps, on les connaissait assez peu. On venait donc pour découvrir, pour en apprendre plus, pour être surpris. De ce point de vue là, mission accomplie : on a découvert des distilleries qu’on ne connaissait pas, on a appris des tonnes de trucs sur le Bourbon et le monde du whiskey aux USA (voir plus bas), et, oui, on a même été surpris par quelques whiskeys en provenance de distilleries artisanales.
Parmi les 5 whiskeys passés sous nos palais, 3 provenaient de distilleries majeures : un Eagle Rare et un Blanton’s Gold de chez Buffalo Trace (Frankfort, Kentucky), et un Larceny de Heaven Hill (Bardstown & Louisville, Kentucky).
Ces distilleries font partie des gros acteurs américains, et, en compagnie d’une dizaine d’autres distilleries, elles représentent 90% de la production du pays. Le reste se partage entre près de 2000 distilleries artisanales ou de petite taille
Ouais, on a été sur le cul nous aussi : on était loin de se douter que ce pays pouvait avoir autant de distilleries en activité. La plupart de ces craft sont récentes et en phase de démarrage, mais on a l’impression que le paysage du whiskey américain suit vraiment celui de la bière, qui a connu une explosion des micro-brasseries depuis une dizaine d’années en Amérique du Nord. Quelque chose me dit qu’on va en déguster de plus en plus souvent, de ce whiskey américain.
Bref, si le Eagle Rare ne nous a pas plu, on a bien apprécié le Larceny pour sa longue finale ronde et originale sur l’herbe coupée ; et le Blanton’s Gold, qui laisse penser à un Highland écossais, rond et boisé.
Les deux derniers whiskeys dégustés provenaient de distilleries artisanales. Excitation !
Bon, ce n’est pas aussi abouti que ce qui sort de distilleries plus établies, mais c’est aussi ce qui fait le charme de ces elixirs. Le premier venait de Few, petite distillerie basée dans la ville où est né la Prohibilition, à Evanston dans l’Illinois. C’était un Bourbon composé à 70% de maïs, qu’on a trouvé très original et qui, malgré quelques petites choses manquantes en bouche, nous donne envie de suivre de près cette distillerie dans les années à venir. On a également entendu dire que le Rye de Few valait le détour : à suivre.
Le second venait de Dad’s Hat, distillerie artisanale spécialisée dans le Rye et située à Bristol en Pennsylvanie. Et là, grosse surprise sur le nez, qui ne ressemble à rien qu’on avait senti jusque-là, sur le thé vert, le cuir et le pain de seigle. Malheureusement, le reste fût décevant, vraiment trop jeune et sur la céréale.
En tout cas, un chouette moment, de belles découvertes en compagnie d’un ambassadeur vraiment intéressant. Et nous, on a (un peu) changé d’avis sur les Etats-Unis lorsqu’il s’agit de whisky
Un peu de culture whisky – Par Julien
Alors, comment ça se passe chez l’oncle Sam les amis ?
Eh bien, il y a plusieurs grosses différences, autant en termes d’appellation que de production. La première est purement calligraphique, whisky s’écrit « whiskey » chez les cow-boys comme chez le cousin irlandais.
La seconde est plus terrienne, et même agricole. Le whiskey américain est un assemblage de plusieurs céréales et non uniquement d’orge malté comme le Scotch whisky. En plus de l’orge, on peut y trouver du maïs, du seigle voire du blé. Ce mélange s’appelle le mash bill, et c’est en fait la recette du whiskey, qui diffère donc suivant les distilleries et leurs diverses marques.
Troisième typicité, il y a deux grands types de whiskeys dans la case de l’oncle Tom : le Bourbon et le Rye. Le Bourbon, qui tient son nom d’un comté du Kentucky appelé ainsi en hommage à la dernière dynastie des rois de France, doit être composé majoritairement de maïs. Une question vous turlupine alors : pourquoi du maïs dans ce Bourbon whiskey ? Tout simplement parce que les colons écossais et irlandais, arrivés dans le Nouveau Monde suite aux nombreuses famines touchant l’Europe, ont fait de l’eau de vie avec ce qu’ils avaient sous la main, et que le maïs était la principale céréale cultivée aux Amériques. Elémentaire mon cher Bourbon !
Les Bourbon whiskeys, qui ne peuvent provenir que des Etats-Unis, sont produits à 95% dans l’état du Kentucky, qui regroupe des distilleries très connues comme Jim Beam, Four Roses ou encore Maker’s Mark. Son très faux jumeau, le Rye whiskey, n’a pas de restriction géographique pour sa production, et doit être composé à 51% de seigle au moins.
Au niveau du vieillissement, les American whiskeys doivent maturer obligatoirement dans des fûts neufs de chêne vierge américains pendant au moins 6 mois. Ils peuvent ensuite porter la mention « Straight » à partir de 2 ans passés en barriques, et n’est donc pas contraint à un vieillissement de 3 ans pour s’appeler whiskey, comme ses cousins européens.
Etonnamment le whiskey américain le plus connu dans le monde n’est pas un Bourbon, et ne vient pas du Kentucky. Facilement reconnaissable à sa bouteille carrée et son étiquette noire, presque aussi stylax que le grand chapeau blanc et la belle moustache brune de son tout petit créateur éponyme, je veux bien entendu parler du Jack Daniel’s qui nous vient tout droit du Tennessee !
Mais comme le disait notre bon vieux Johnny, qu’a ce célèbre whiskey en lui de Tennessee ?
Tout d’abord, un mash bill bien réfléchi : 80% de maïs, 12% d’orge et 8% de seigle, une recette inchangée depuis plus de 150 ans. Et surtout, après distillation, le whiskey est filtré par une couche de charbon de bois d’érable de 3 mètres avant sa mise en fût. Ce procédé, le Lincoln County Process, confère ainsi toute sa douceur à la star des whiskeys américains.
Au niveau marketing, les grosses distilleries choisissent un nom différent pour leurs multiples recettes et leurs différents vieillissements. Par exemple, Buffalo Trace produit le Eagle Rare (10 ans), le Blanton’s Original (6 à 8 ans, qui est un single barrels, l’équivalent d’un single cask écossais) et plusieurs autres whiskeys en plus du Buffalo Trace classique qui a entre 4 et 6 ans d’âge.
La dernière nouvelle va ravir les amateurs. La France étant un marché fort et stratégique pour les potes de Joe Dassin, certains des plus grands Bourbons américains sont disponibles dans l’Hexagone alors qu’ils ne sont pas accessibles chez eux ! Alors qu’est-ce qu’on attend ?
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